Comment faire parler l’eau

Vendredi dernier, les élèves de la Binquenais (Rennes) ont assisté à une conférence autour du cycle de l’eau, donnée par 2 jeunes chercheurs en hydrogéologie de l’université de Rennes 1. Un échange très riche !

Camille Bouchez et Ronan Abherve sont 2 jeunes chercheurs de l’OSUR (l’Observatoire des Sciences de l’Univers de Rennes), en post-doctorat et en 3ème année de thèse. L’objectif de leur intervention auprès des élèves de 5ème : questionner le cycle de l’eau et les perturbations liées à l’homme.

Les chercheurs ont commencé par présenter leur métier : « hydrogéologues » signifie qu’ils travaillent sur l’eau et sur la Terre… c’est-à-dire sur les eaux souterraines.

L’une de leur mission, lorsqu’ils sont sur le terrain (« le bonheur ! ») : faire parler l’eau pour savoir quel âge elle a, d’où elle vient, comment elle bouge et où elle va.

Après le terrain vient le temps de la géochimie (« une torture ! »), qui consiste à analyser les prélèvements d’eau pour en connaître la teneur en minéraux et l’origine. Par exemple : a-t-elle voyagé longtemps ou vient-elle juste de tomber ? Cette analyse leur permet d’aboutir à des modélisations (« le casse-tête ! ») utilisant les maths et la physique.

Comprendre le cycle de l’eau

Premier constat qui a surpris les élèves : il y a de l’eau partout sur Terre, même sous le désert du Sahara. Des eaux souterraines s’infiltrent en effet depuis d’autres régions et peuvent être présentes depuis plusieurs centaines de milliers d’années, à une époque où le Sahara avait des airs de jungle. Deuxième surprise : l’eau peut être très très vieille…

Pourtant, « une fois qu’elle s’évapore, elle retourne dans les nuages et après elle retombe… donc c’est la même eau », s’étonne un élève.

Et c’est exactement le cœur du sujet : essayer de comprendre le cycle global de l’eau. Pour cela, il faut avoir 3 éléments en tête :

  • le stock de l’eau sur Terre est stable
  • l’eau existe sous 3 états : liquide, solide et gazeux
  • l’eau circule et se transforme en permanence (elle passe sa vie à se transformer !)
Le cycle de l’eau commence toujours à la mer et le but ultime d’une goutte d’eau est d’y retourner.

Répartition des rôles

Et à l’intérieur de ce cycle, comment se répartit l’eau ? Pour que les élèves visualisent plus facilement, Camille Bouchez fait le parallèle avec les élèves : sur 34 personnes, 33 formeraient les océans et les mers, et 1 seule serait de l’eau douce.

Si maintenant 30 personnes représentaient le réservoir d’eau douce, quelle serait leur répartition ?
– 2/3 seraient des glaciers (20 personnes)
– 1/3 serait tout le reste : eaux souterraines (8 personnes), lacs/fleuves/rivières (1 personne), nuages et atmosphère (1/2 personne)

1 journée dans un nuage, des milliers d’années sous Terre

Autre question des jeunes : « quelle est la durée du cycle de l’eau » ? Parmi toutes ces petites gouttes d’eau, qui arrivera à la mer en premier ? Pour comprendre, rien de tel que de transformer les élèves en gouttes d’eau !
« si tu es rivière et que je te pousse, tu deviens mer tout de suite »
« si je suis nuage, que je pleux et que je m’infiltre dans le sol, je prends la place d’une eau souterraine et c’est la 10ème eau souterraine qui finit à la mer »

C’est donc sous Terre que l’eau passe le plus de temps (et qu’elle est la plus vieille) : environ 1 journée dans un nuage, 1 semaine dans une rivière, 1 an, 100 ans voire des milliers d’années sous Terre. Cela dépend de la pluviométrie et de la distance à la mer. En Bretagne, comme il pleut tout le temps (!) et que la mer est proche, l’eau reste en moyenne quelques dizaines d’années sous Terre.

L’homme, perturbateur du cycle

Enfin, les chercheurs ont abordé la question des modifications du cycle de l’eau liées à l’homme. La principale perturbation est liée au réchauffement climatique : comme l’homme chauffe la planète, l’eau s’évapore plus vite et les glaciers fondent. Et l’homme perturbe ainsi le cycle global de l’eau.

Se pose aussi la problématique des produits chimiques et de la pollution des eaux. Finalement, « l’eau peut-elle devenir rare », questionne un élève ? La quantité d’eau sur Terre restera toujours la même, mais le problème vient plutôt de la quantité d’eau douce disponible et de bonne qualité. C’est elle qui peut potentiellement devenir rare… et qui est déjà rare dans certains endroits du monde.

Insatiables, les élèves ont encore posé plusieurs questions aux chercheurs :
– qu’est-ce que l’eau ?
– est-ce qu’on peut créer de l’eau ?
– comment fait-on pour connaître le volume total d’eau sur Terre ?
– si on emmène de l’eau dans l’espace, est-ce qu’on perturbe le cycle de l’eau ?

Un bel échange, une belle curiosité des élèves et un précieux support pour les interventions artistiques de la compagnie Flowcus, dès le mois de mars.

Hélène Jolly, Espace des sciences